fantôme menaçant (peter)

Les événements marques, détruises, laissent des blessures indélébiles. Les rêves ne cessent de me le prouver, comme un rappel massacrant de ce que j’ai perdu, de ce que j’ai laissé filer. Etais-ce le bon choix ? La bonne décision à prendre ? Le bon chemin à emprunter ? Tellement de questions qui resteront en suspens, tellement de fantasmes, de scénarios que je ne pourrais qu’imaginer, sans jamais savoir si la tournure aurait été la bonne. Une fois de plus, ma nuit fut courte, trop courte. Les remords, la douleur…de douces compagnes éternelles. J’ai appris à vivre avec, parce qu’on ne revient pas en arrière, on ne change pas le passé. Si je n’avais pas laissé mes sentiments crevés, il serait mort…c’est ce que j’aime me murmurer pour m’endormir, pour me caresser dans le sens du poil. Une part de moi, pourtant, en ricane sauvagement, comme un mensonge que je sais inévitable.

Alors oui, ma journée fut vraiment merdique. J’avais dû prendre sur moi pour ne pas étriper les mannequins avec qui je bossais, prendre sur moi pour ne pas égorger certaines personnes au boulot. Inutile de dire que ma part démoniaque n’en a pas été ravie, mon père aurait tout aussi pu me renier que ça aurait été normal. Une fois ma journée finie, j’avais pris soin d’aller me chercher deux cafés à emporter, des bretzels et un donut. Le sucre m’aide à me contenir, à rendre mon univers plus paisible, moins sauvages. Ajouté à ça le bruit incessant des pensées animales qui me percutent quand j’en croise, et là, ma journée est totalement foutue. C’est non donc, sans surprises, que je fuis dans un horizon plus isolé, plus naturel comme j’aime le penser. Deux heures. Je ne demande que deux heures de répit…deux heures de calme, mais bien sûr, c’était trop demander.

Déjà, mon téléphone s’enclenche, criant cette sonnerie méprisante que j’ai appris, avec le temps, à détester. Un shoot en urgence. Le photographe qui devait prendre en charge celui-ci est subitement tombé malade...Disons plutôt qu’il a été frappé de la maladie de fainéantise, chose que je ne peux pas me permettre. C’est donc avec un soupire théâtrale que je remonte le sentier des heures supplémentaires, prenant la direction du Bay Mirror. C’est à peine une demi-heure plus tard que les grandes portes s’ouvrent devant moi, mon matériel en main, l’air neutre et professionnel s’étant formé sur mon visage sans âme. Ame...j’en rigolerais presque devant l’étendue des couleurs qui s’offrent à moi. Tantôt plus claires, tantôt plus sombres. Aura qui se mélangent, palpables à l’oeil qui m’est propre. Pouvoir hériter de ma mère, sans aucun doute...Enfin, c’est ce que j’ose espérer. Trop souvent, j’espère dans quelques murmures que mon reflet soit plus proche de ma mère, que de celui de mon père. De belles illusions. Il ne me faut que quelques minutes avant de trouver un responsable, prendre les informations nécessaires et m’isoler dans une pièce. Apparemment, l’homme qui me servira de mannequin doit me rejoindre dans quelques secondes. Merveilleux. L’envie de filer est déjà palpable alors que je joue avec l’objectif et ce, jusqu’à ce que j’entende la porte s’ouvrir et que je me détourne de mon but pour...m’immobiliser sur le champ. Si cette journée me semblait horrible, là, elle ressemble davantage à un supplice sans nom.